Sur une proposition de Maxence Alcalde & Georges Mutsianos, pour la Galerie Schleicher+Lange
Exposition du 19 au 24 juillet 2010
« Prendre l’apparence du poulpe, c’est se faire polùplokos, ce n’est plus seulement posséder un lógos de poulpe, c’est se montrer capable de s’adapter aux situations les plus déconcertantes, de prendre autant de visages qu’il y a de catégories sociales et d’espèces humaines dans la cité, d’inventer les mille tours qui rendront son action efficace dans les circonstances les plus variées. »
Detienne et Vernant,
Les Ruses de l’intelligence chez les Grecs,
Champs/ Flammarion, p. 48.
Dans les années 1980, des penseurs comme Gilles Deleuze et Félix Guattari et des écrivains comme Maurice Dantec ont pensé les conditions d’existence d’un devenir schizophrène. Une nouvelle forme de dédoublement de personnalité viendrait à s’opérer non plus sur le mode du pathologique mais sur celui de la nécessité d’adhérer à des réalités successives.
Pour la jeune génération d’artistes, ce devenir schizophrène considéré comme « jeu social » est pleinement assumé : multiplication des pseudonymes (du tag au web), pensée de l’instant exprimée on-line, dynamitage des tribus musicales et éclectisme rendu possible par le téléchargement illégal, amitiés multiples et croisées, conscience du réseau… Dans ce contexte, qu’en est-il de la fiction à l’ère où chacun est amené à se présenter sous l’identité qui lui semble adéquate au moment où il apparaît ? Est-il encore possible d’évoquer une autobiographie autrement que sous le régime de l’autofiction morcelée, ondoyante et multiple comme les tactiques du poulpe des mythes grecs ? Et c’est sur l’héritage de cette tactique du poulpe que s’élabore l’idée de « poulpisme ».
Sur le modèle de la série télé, Poulpisme est pensée par « saisons », chacune racontant une histoire singulière faisant parfois intervenir les mêmes « personnages ».
Poulpisme renoue également de manière ironique avec les avant-gardes historiques en créant un nouvel « isme ».
Saison I : Nous étions jeunes et larges d’épaules
Poulpisme présente le travail de jeunes artistes dont l’œuvre explore les limites de la fiction offrant autant d’occasions de renouvellement de ce genre (journal intime, « autofiction », délire narcissique, paranoïa, etc.). Pour ce premier volet, Poulpisme s’intéresse aux fictions amoureuses et sentimentales. Héritiers des telenovelas, des soap-operas et de la chanson populaire (dont elle emprunte le titre à un refrain d’un tube de Bernard Lavilliers) cette sélection d’œuvres interroge notre rapport à la construction de l’image amoureuse.
Vernissage de l’exposition le lundi 19 juillet à partir de 18h en présence des artistes
« Poulpisme » est une exposition produite par le collectif Beautiful Art avec les œuvres de :
Charlotte CARDONNE, Laetitia FERRER, Lucas HENAO, Marcuss LAHOUD, Georges MUTSIANOS,
Sandra SUAREZ, IlonaTIKVICKI.
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Based on a proposal by Maxence Alcalde & Georges Mutsianos, for Galerie Schleicher+Lange
July 19th to 24th 2010
« Taking on the appearance of the octopus, making oneself polùplokos, involves not only possessing the lógos of the octopus but also proving oneself capable of adapting to the most baffling of situations, of assuming as many faces as there are social categories and types of men in the city, of inventing the thousand ploys which will make one’s actions effective in the most varied of circumstances. »
Marcel Detienne and Jean-Pierre Vernant,
Cunning Intelligence in Greek Culture and Society,
Trans. Janet Lloyd
Chicago: U of Chicago P, 1991, p. 39-40.
During the 1980s, the conditions of existence of a schizophrenic future were pondered by thinkers such as Gilles Deleuze and Félix Guattari and evoked by Maurice Dantec among other writers. A new form of split personality would take place, this time not pathologically but out of the necessity to adhere to successive realities.
For the young generation of artists, this schizophrenic future considered a « social game » is fully assumed: multiplication of pseudonyms (from graffiti tags to Internet), instant thoughts expressed on-line, abolition of musical tribes, eclecticism made possible by illegal music download, multiple intersecting social connections, conscience of the network… What is the place of fiction at a time when everyone chooses to identify as it is best suited at a given moment? Is it still possible to put forward an autobiography other than a scrappy, changeable and many-sided self-fiction analogous to the tactics of the octopus in Greek myth? « Octopusism » is thus developed from the legacy of these tactics.
Based on the model of TV series, Poulpisme is conceived in « seasons », each telling a singular story where recurrent « characters » intervene on occasion.
Poulpisme also establishes an ironic link to historical avant-gardes by creating a new ism.
Season 1: We were young and broad-shouldered
Poulpisme presents the works of young artists whose pieces explore the limits of fiction, offering as many occasions to renew this genre: private diary, « self-fiction », narcissistic madness, paranoia, etc. For this first part, Poulpisme will focus on romantic and sentimental fictions. The telenovela, the soap opera, and the popular song —that gives its title to this season from the chorus of a hit by Bernard Lavilliers— are the predecessors of this selection of works that questions our relation to the construction of the image of love.
Vernissage monday July 19th at 6:00 pm with the artists
« Poulpisme » is an exhibition produced by Beautiful Art with the works of :
Charlotte CARDONNE, Laetitia FERRER, Lucas HENAO, Marcuss LAHOUD, Georges MUTSIANOS,
Sandra SUAREZ, IlonaTIKVICKI.
TRANSLATION : José MORALES BONILLA