Anri Sala, vue de l’exposition au Centre Pompidou, 2012

Jusqu’au 6 aout, le Centre Pompidou présente une exposition originale de l’artiste Anri Sala (né en 1974). Il serait réducteur, voir absurde, de dire qu’on peut y voir les quatre films annoncés dans la brochure (1395 Days without Red, (2011), Answer Me, (2008), Le Clash (2010), Tlatelolco Clash, (2011)). Car ce ne sont pas des « films » que sont invités à voir les visiteurs, mais un montage in progress de ces films. Le dispositif imaginé par Sala est aussi simple qu’efficace : les films apparaissent successivement (et de manière aléatoire) en projection sur des écrans qui ponctuent le parcours de la salle du rez-de-chaussée du Centre Pompidou. Le visiteur est donc amené à suivre les écrans.

Cette transhumance du spectateur se fait évidemment en troupeau, ce qui donne un balai assez captivant lorsqu’on regarde la scène de la rue par les grandes baies vitrées. D’ailleurs, dans un entretien avec Christine Macel, Anri Sala déclare : « Mon intention n’est pas de mettre l’accent sur l’un des films ou l’un des objets exposés, mais de créer entre eux une correspondance singulière qui va indiquer le tempo au spectateur et lui suggérer son cheminement à travers l’exposition, comme une chorégraphie. »

On comprend assez rapidement que ce qu’il y a à voir n’est pas chacun des films, mais un montage entre ces films, alors considérés comme des rushs. Chacune des scènes apparaît sans générique ni carton, ce qui donne l’impression d’assister à un spectacle « cohérente » dans un premier temps. En alternant la projection sur les divers écrans de la salle, l’artiste parvient à plonger le spectateur dans une errance semblable à celle de la brune mystérieuse aux faux airs d’Anna Mougladis de 1395 Days without Red. Reste que l’ensemble des autres oeuvres exposées passent un peu à la trappe en regard de l’expérience offerte par le dispositif vidéo. Reste également qu’on n’est pas certain que les films revus séparément (et dehors du dispositif du Centre) puissent dès lors être aussi captivants par la suite. Peut-être que l’effet pervers de cette installation (et donc sa réussite!) est de nous faire prendre conscience que nombre de vidéos d’art contemporain ne sont que de longs plans de coupe combinables à merci…

Anri Sala, Answer Me, 2008.
High-definition video projection, stereo sound, 4 min 51 s, 3/6.*
Anri Sala, 1395 Days without Red, 2011. Vidéo, 65 min
Centre Pompidou Paris3 mai – 6 août 2012
11h00 – 21h00