Ceux qui me connaissent un peu savent que j’ai l’habitude de râler contre la rubrique « livres » d’Artpress, notamment parce que personne ne lit plus le énième article d’Henric sur Sade, Bataille, Barthes, Artaud, Sollers,  etc. (cochez la mention inutile !) et que les pages suivantes ne parlent souvent que des bouquins de leurs potes (d’ailleurs il aurait été plus juste d’appeler cette rubrique « copinage » comme le faisait Charlie Hebdo à une époque). Bref, une rubrique inutile (sauf pour savoir qui est amis avec les gens d’Artpress) qui avait même tendance parfois à empiéter dangereusement sur le rédactionnel consacré aux arts plastiques. Je parle au passé, car la situation semble quelque peu changer… Serait-ce l’arrivée d’Anaël Pigeat comme rédacteur en chez de la pimpante quadra[1], mais la rubrique « livre » semble amorcer un tournant dans le dernier numéro (Artpress 394, nov. 2012).

Alors bien sur,  il y a toujours un article sur Sollers (avec une iconographie  grotesque qui fait jouxter l’attrapeur de normaliennes avec un buste d’Epicure !), un article sur Christine Angot,  une portée aux nues du dernier livre de Jean-François Chevrier, sans oublier le « feuilleton » de Jacques Henric (feuilleton qui a dû supplanter la série Dynastie dans sa longueur et sa répétition). Mais il y a aussi (et surtout) des critiques de livres intéressantes, un article sur Oran Pamuk et un entretien passionnant avec Jean-Pierre Cometti.

Intitulé « le temps de la critique », l’entretien de Cometti par Eric Mangion est particulièrement captivant d’autant qu’il semble battre en brèche certaines des options théoriques qu’on associait jusqu’alors à Artpress. Par exemple l’entretien s’ouvre sur cette réponse de Cometti à la question de Mangion sur la place du philosophe dans les discours sur l’art : «La Position des philosophes est ambiguë  L’intérêt qu’ils portent à l’art est toujours plus ou moins empreinte de leurs propres démangeaisons, à quoi il faut ajouter leur propension à se donner l’avantage d’un accès privilégié à toute chose qui se révèle digne de leur attention. » (p. 86), rien à redire… Un peu plus loin, Cometti déclare : «quand à statuer sur l’art, je ne crois pas que cela ait beaucoup de sens pour la philosophie » (p. 86)… L’entretien est ponctué d’autres réflexions de Comettivqui font du bien à lire dans Artpress. Seul regret, ça ne fait que deux pages (alors que la page du fan club de Sollers en fait 3 !)… Alors, en hommage à l’arrière garde d’Artpress (c’est-à-dire en étant un peu « sadien ») , lançons en cœur un hourra de soutien au nouveau rédac-chef : « Débarrassez-vous de vos antiquités ! Anaël encore un effort pour être révolutionnaire ! ».

le fan club de fifi!

[1] Artpress fêtera prochainement son 40e anniversaire, gageons qu’ils sauront faire un gros gâteau avec des bougies en forme de colonnes de Buren !