Jul

Les Journées Européennes du Patrimoine avaient lieu le weekend dernier, occasion pour le moindre patelin miteux de faire visiter l’emplacement d’anciennes latrines où avait cagué Napoléon non loin d’une prétendue voie gallo-romaine où avait été retrouvé, par un paysan du cru, une rognure d’ongle étrusque très bien conservée… bref, un moment de culture et de partage béni sous les heureux hospices des imbéciles heureux qui sont nés quelque part.

Parfois, des individus proposent d’ouvrir leur « lieu » pour le faire découvrir aux curieux. Parfois, même ce sont des artistes qui profitent de l’occasion pour montrer leurs oeuvres et celles d’amis. Voilà ce que proposait Arnaud Cohen dans sa Coutellerie de Cenon sur Vienne. Dans les règles de l’art, il avait même demandé à deux commissaire de superviser l’évènement (Julie Crenn et Jérôme Diacre) qui avaient invité des artistes (Tania Mouraud, Sans Canal Fixe, Regis Perray, Pierre Fraenkel, Marie Jeanne Hoffner, Black Sifichi, et Arnaud Cohen). Seul hic, la subvention nécessaire au financement du transport des oeuvres n’est jamais arrivée, l’expo en a donc été quelque peu modifiée…

Marcel Broothaers, Musée d’art moderne Département des Aigles Section des Figures, 1972.

Un mal pour un bien, car Arnaud Cohen décide d’en tirer une vidéo particulièrement pertinente. L’artiste propose une visite guidée de l’exposition comme si les oeuvres étaient présentes. Ce n’est qu’après quelques minutes de visionnage qu’on comprend que les oeuvres ne sont pas devant nos yeux et que seul le discours du « médiateur » subsiste. Ainsi, Arnaud Cohen offre une appréhension directe d’une forme de ruine archivée et donc transformée en patrimoine, dans sa pure acceptation romantique. Même si la vidéo s’inscrit dans la « tradition » de la critique institutionnelle au même titre que le Département des Aigles de Marcel Broothaers (1972) visites guidées d’Andrea Fraser (Museum Highlights, 1989), Arnaud Cohen y insuffle un côté home-made non sans charme. Et si c’était ça notre vrai patrimoine !